Depuis 2024, le premier PSE Régénératif, porté par Pour une Agriculture du Vivant et l’Agence de l’Eau Artois-Picardie, propose un nouveau modèle de transition : rémunérer les changements de pratiques des agriculteurs vers l’agroécologie tout en sécurisant leur transition grâce à des financements publics et privés.
Parmi les agriculteurs engagés, Benoît Guilbert, agriculteur dans le Pas-de-Calais, voit dans le PSE Régénératif bien plus qu’un simple dispositif incitatif. Pour lui, ce projet est une première étape vers une nouvelle manière de rémunérer le travail des agriculteurs, en tenant compte non seulement de leur production, mais aussi des services environnementaux qu’ils rendent au territoire.
Un projet pour valoriser autrement le métier d’agriculteur
Agriculteur de 3ᵉ génération, producteur de céréales, de légumes et de lin, Benoît Guilbert n’a pas attendu le PSE Régénératif pour modifier ses pratiques. Depuis son installation en 2019, il a fait évoluer son exploitation par conviction, persuadé que l’agroécologie permet d’améliorer la fertilité des sols, la biodiversité et la qualité de l’eau. Mais il a souvent constaté que ses efforts peinaient à être reconnus à leur juste valeur.
« Quand je me suis lancé dans l’agroécologie, je l’ai fait par passion, par conviction personnelle et agronomique, mais ces démarches n’ont jamais été justement rémunérées parce que tout le monde se fiche de savoir comment on produit. »
Le projet de PSE Régénératif lui apparaît alors comme une avancée majeure : pour la première fois, un dispositif lui propose de rémunérer l’ensemble des pratiques agricoles mises en place sur sa ferme et non plus uniquement la quantité produite.
« À partir du moment où j’ai connaissance d’un projet qui rémunère non seulement le produit, mais aussi les pratiques, c’est clairement une motivation d’aller chercher une valorisation sur mon travail. »
Le PSE Régénératif, un levier économique, mais aussi un collectif pour réussir la transition
Au-delà de la reconnaissance de son travail, Benoît voit aussi dans le projet un soutien financier nécessaire pour accompagner les changements de pratiques.
« On est des chefs d’exploitation, des entrepreneurs, et il faut bien faire bouillir la marmite. »
Pour encourager les agriculteurs dans cette transition, le projet de PSE Régénératif leur apporte un soutien financier. Ceux-ci perçoivent non seulement des primes filière versées par leurs clients, couvrant une partie des surcoûts liés aux nouvelles pratiques, mais aussi un paiement pour les services environnementaux rendus, versé par l’Agence de l’eau Artois Picardie.
Mais au-delà du financement, Benoît insiste sur un autre aspect essentiel du projet : l’intelligence collective et l’échange entre agriculteurs. Lors des formations et des visites de terrain, il apprécie les discussions informelles, qui permettent de confronter les expériences et d’éviter certaines erreurs.
« Le dialogue entre les agriculteurs est aussi important que la réunion. Parce qu’on s’est vu à une réunion, on peut facilement s’entraider : ‘Comment tu compostes ? Quel matériel tu as acheté ? Comment tu l’as négocié ?’ Tout ça crée de la confiance et de la solidarité. »
Une transition des pratiques agricoles qui doit être accompagnée pour être viable
Si Benoît Guilbert s’est engagé dans l’agroécologie, c’est avec la conviction que les efforts d’aujourd’hui porteront leurs fruits demain. Mais cette transition, bien que prometteuse, s’accompagne d’une nécessaire phase d’adaptation, où chaque ajustement doit être testé, validé, et parfois corrigé.
« En cinq ans, j’ai déjà constaté des améliorations : mes tracteurs font moins d’heures, j’ai moins d’usure de matériel, mes sols s’améliorent… »
Grâce à des sols plus riches en matière organique et mieux structurés, son exploitation gagne en autonomie, notamment en réduisant sa dépendance aux engrais et aux intrants. Les bénéfices ne sont pas seulement environnementaux : la réduction du travail du sol diminue aussi les coûts liés au carburant, à l’entretien des machines et au temps passé sur le terrain.
Cependant, cette évolution ne se fait pas sans difficulté. L’abandon progressif de certaines pratiques conventionnelles crée de nouveaux défis, notamment en matière de gestion des adventices et de protection des cultures.
Si Benoît est convaincu des bienfaits de l’agroécologie, il sait aussi que changer de modèle ne se fait pas sans coût. Passer à des pratiques plus durables implique des investissements en matériel, en formation et en expérimentations, avec des résultats parfois incertains à court terme.
« Si je booste l’activité microbiologique de mes sols, que je fais en sorte qu’ils soient vivants, autonomes, mais que je perds en rendement et donc en chiffre d’affaires… Ok, agronomiquement, je suis peut-être dans le vrai, mais encore faut-il que cela assure un revenu viable. »
Au-delà de l’adoption de nouvelles techniques, il est essentiel que ces choix s’inscrivent dans un modèle économiquement durable. C’est là que le PSE Régénératif prend tout son sens. Avec le double financement public-privé, Benoît est rémunéré pour les services écosystémiques rendus, et ses surcoûts liés aux nouvelles pratiques sont pris en charge. Il peut ainsi s’engager sereinement dans la transition.
« Aujourd’hui, on commence à être rémunéré pour autre chose que la simple production agricole. On parle de paiement à la tonne de carbone, de valorisation de la qualité des sols et de l’amélioration de la qualité de l’eau. Ce sont des approches encore récentes, mais prometteuses pour le futur. L’Agence de l’Eau, à travers le PSE, rémunère désormais des pratiques bénéfiques pour l’environnement. C’est une nouvelle manière d’envisager le revenu des agriculteurs. »
Pour Benoît, ce dispositif est une avancée essentielle, mais il ne doit être qu’un point de départ. Il imagine déjà un modèle agricole où la rémunération des agriculteurs ne se limite plus à la seule vente de leurs récoltes, mais intègre aussi leur contribution à la préservation des ressources naturelles.
Pour lui, l’avenir de l’agriculture passe par une reconnaissance globale du rôle des agriculteurs : producteurs de nourriture, mais aussi gestionnaires de paysages, protecteurs des sols et garants de la qualité de l’eau. Un modèle dans lequel leur travail serait valorisé à la hauteur des enjeux environnementaux et sociétaux actuels.
Un projet développé en partenariat avec :
L’amont agricole partenaire du PSE Régénératif :
L’amont agricole partenaire du PSE Régénératif :
Pour aller plus loin...
Dans les Hauts-de-France, l’association Pour une Agriculture du Vivant et l’Agence de l’Eau Artois-Picardie se sont associées pour mutualiser les dispositifs de financement publics et privés afin de couvrir le risque des agriculteurs s’engageant dans la transition et de rémunérer les services écosystémiques rendus avec ces nouvelles pratiques de l’agriculture de régénération.
Grâce à sa vision systémique des enjeux de la transition et à sa capacité de mobilisation unique, l’association coordonne ou contribue à des programmes collectifs d’ampleur, qui visent à lever ces verrous et développer des solutions agroécologiques innovantes.
Répondre aux défis de la transition agroécologique, autour d’une initiative stratégique innovante : la création de coalitions territoriales public-privé pour financer et déployer la transition agricole et alimentaire à grande échelle.