Nous avons réuni techniciens agricoles, conseillers techniques, animateurs, responsables agronomiques, partenaires et intervenants jeudi 12 décembre à La Ferme de Gally, à Saint-Denis !
L’occasion pour chacun des participants de se retrouver dans un cadre convivial et participatif pour partager ses expériences de terrain et ses enjeux au service de l’accompagnement des agriculteurs.
2024 : une année de consolidation et de développement
Pour introduire cette journée, un rapide tour d’horizon des actualités du mouvement a été proposé… Une année 2024 qui a permis de consolider des outils et de développer des projets pour massifier la transition agroécologique avec :
La V3 de l’Indice de Régénération Grandes Cultures, Productions Légumières (GCPL) : nous avons fait évoluer l’outil vers une version plus fonctionnelle, intégrant davantage la biodiversité et limitant les indicateurs purement réglementaires.
De nouveaux modules combinants diagnostics agroécologiques et carbone renforcent le pilotage des systèmes agricoles, permettant de calculer des facteurs d’émissions spécifiques aux filières agroécologiques tout en offrant une vision globale pour des actions plus efficaces.
COVALO : un projet pour construire les conditions de la massification. 6 coalitions territoriales ont été mises en place pour déployer la transition à grande échelle.
Agrocursus IR : former pour accompagner la transition
La formation des techniciens reste au cœur de notre démarche. Avec Agrocursus IR, nous proposons avec notre partenaire Icosystem un parcours d’apprentissage continue de 18 mois, qui allie modules en ligne, ateliers collectifs et échanges entre pairs.
L’objectif est de doter les techniciens des compétences agronomiques, des méthodes et des outils nécessaires pour aider les agriculteurs à construire des itinéraires techniques performants et résilients, et à sécuriser leur transition agroécologique dans la durée.
L’année des techniciens en chiffre :
Des ateliers pour échanger et construire l’accompagnement des agriculteurs dans la transition
Cette année, la Journée Annuelle des Techniciens du Vivant a mis l’accent sur l’accompagnement global des agriculteurs, en abordant toutes les dimensions de leur métier : agronomique, humaine et sociale. Du diagnostic des sols à la compréhension des besoins et des émotions des producteurs, l’objectif est de donner aux techniciens les clés pour aider les agriculteurs à bâtir des systèmes plus résilients, tout en les soutenant dans leur transition agroécologique.
Cultures pérennes : résultats d’essais (plantation, couverts végétaux et biostimulations)
Animé par Nicolas Brousseaud, expert indépendant, cet atelier s’est concentré sur des itinéraires techniques mis en place dans un verger agroécologique en Bretagne. À travers ce cas concret, les échanges ont porté sur l’intégration de couverts végétaux, la gestion de la fertilité et de la biodiversité, la lutte contre certains ravageurs, ainsi que l’adaptation des pratiques face aux contraintes liées à l’irrigation ou aux conditions pédoclimatiques.
L’introduction de brebis au verger, la production et l’application de jus de luzerne, ou encore l’utilisation de préparations naturelles ont été abordées pour illustrer la diversité des approches et stratégies possibles.
Grandes cultures et productions légumières : résultat d’essai couverts végétaux et réduction du travail du sol
Présenté par notre partenaire GreenSol, cet atelier a montré comment l’accompagnement des agriculteurs vers des systèmes durables passe par une approche globale, centrée sur l’agronomie et notamment le sol.
Les couverts végétaux y occupent une place stratégique : ils améliorent la structure des sols, favorisent la biodiversité, recyclent les éléments minéraux et limitent l’érosion. L’importance de semer tôt, de maîtriser la profondeur de semis et de bien choisir les espèces a été soulignée, tout comme la nécessité de détruire le couvert avant la floraison. La réduction du travail du sol a également montré son intérêt sur le plan des rendements et la diminution des charges.
En somme, l’animateur a expliqué que le non-labour n’est pas une finalité, mais un outil de performance.
L’organisation du conseil entre acteurs
Cet atelier a porté sur la nécessité de coordonner et de clarifier l’accompagnement technique des agriculteurs, en dépassant notamment le cloisonnement des approches et la multiplicité des interlocuteurs.
Les participants ont identifié plusieurs freins : la concurrence entre acteurs, la complexité administrative, la difficulté à trier l’information ou la crainte autour de l’usage des données.
À terme, l’objectif est de créer un modèle d’accompagnement plus lisible, cohérent et transparent pour l’agriculteur, en respectant le rôle de chaque acteur de conseil et la concurrence qui existe. L’une des premières étapes est d’échanger entre structures pour que chaque conseiller puisse avoir le même niveau d’information auprès de l’agriculteur.
Groupe d'échange de pratique
Animé par l’association TRAME, cet atelier a permis aux participants d’apprendre une méthode de partage entre pairs : le Groupe d’échange de pratique (GEP). Au travers d’un échange sur une situation professionnelle délicate rencontrée par l’un d’entre eux, les participants ont pu tester la méthodologie proposée et partager leurs points de vue, explorer différentes hypothèses et envisager des réponses adaptées. Il a notamment été souligné l’importance de reconnaître les émotions en présence, d’admettre la limite de ses connaissances lorsqu’on n’a pas la réponse, et de se préparer aux questions sensibles en amont d’une intervention.
Cet exercice a ainsi renforcé la capacité de chacun à gérer des contextes difficiles.
La force des prairies en système polyculture avec ou sans élevage
Cet atelier, animé par l’agronome indépendant Étienne Gautier, a mis en lumière les avantages d’intégrer des prairies dans la rotation, même sans élevage. Les prairies contribuent à améliorer la structure et la porosité du sol, à accroître la teneur en carbone, à limiter le tassement et les traitements phytosanitaires, et à augmenter significativement les rendements des cultures suivantes.
La clé est d’envisager la prairie comme un temps de repos pour la parcelle, permettant aux sols de se régénérer grâce à des cycles racinaires et une meilleure organisation verticale. La gestion des prairies vise à favoriser une biomasse abondante et une meilleure nutrition animale lorsque des bêtes sont présentes. En pratique, cela implique de ne pas couper ou pâturer trop ras, d’adapter la composition et de limiter l’apport d’engrais pour préserver la fonctionnalité agroécologique du système.
Biostimulations et préparations naturelles : restitutions d’essais en grandes cultures
Devant un auditoire intéressé, mais sceptique sur l’efficacité des biostimulants, l’atelier présenté par notre partenaire Biosphères a présenté l’intérêt et les limites de la biostimulation dans l’approche globale d’une exploitation agricole.
Les biostimulants agissent principalement sur la fertilité biologique et chimique du sol, et nécessitent donc un diagnostic précis pour être choisis et appliqués dans les bonnes conditions. Les résultats des essais sont souvent variables, voire peu concluants sur le rendement, d’où l’importance de réaliser un diagnostic et d’envisager des approches multifactorielles.
L’effet des biostimulants n’étant pas suffisamment régulier et intéressant, il est important de prendre en compte d’autres éléments agronomiques dans l’approche ; structure du sol, gestion de la matière organique, statut acido-basique.
Construire son accompagnement autour des besoins de l’agriculteur
Cet atelier, animé par Trame, a mis l’accent sur la dimension humaine de l’accompagnement des agriculteurs, au-delà des seuls aspects techniques. Les techniciens ont découvert un outil d’analyse : RPBDC (Réel, Problème, Besoin, Demande, Contrat). Avec cet outil, qui agit comme une grille de lecture de situation, les techniciens ont pris conscience de l’importance de comprendre les enjeux des agriculteurs, ses besoins et ses demandes, afin de définir un cadre d’intervention clair.
Ce travail a souligné que la relation humaine, la communication, et le positionnement en tant qu’accompagnateur sont tout aussi essentiels que l’expertise technique dans l’accompagnement au changement pour répondre aux défis des agriculteurs.
Accompagner humainement le changement des agriculteurs
La conférence de clôture, animée par TRAME, a mis l’accent sur la nécessité de replacer l’humain au cœur de l’accompagnement, au-delà des seuls aspects techniques.
Les changements, dans toutes leurs dimensions, sont des moments de doutes, dans lesquelles les concernés sont souvent traversés par des émotions, des ambivalences et des peurs. L’écoute active, l’empathie et la compréhension sont des leviers essentiels pour avancer collectivement.
L’intervenant a encouragé les conseillers et techniciens à adopter une posture d’écoute bienveillante, sans jugement ni volonté de trouver immédiatement une solution technique, afin de reconnaître et accueillir les émotions et les résistances. Cette approche permet de sécuriser le parcours de transition et de donner à l’agriculteur les moyens de faire ses propres choix, une clé essentielle pour l’acceptation et l’accélération de la transition agroécologique.