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L’agroécologie : remettre l’agronomie au coeur de la transition
Face à l’augmentation croissante de la population mondiale et des besoins alimentaires, il est indispensable d’avoir une vision systémique des solutions possibles. C’est ce que propose l’agroécologie, intégrant à la fois des dimensions environnementales, sanitaires, sociales, sans oublier les performances économiques.
L’agroécologie : une approche systémique qui encourage la transition agricole
Apparu à la fin des années 20, le concept d’agroécologie s’inspire des principes écologiques pour une application agronomique. Les définitions ont évolué au fil du temps, et ce n’est que dans les années 80 que cela devient une discipline à part entière.
Pour la FAO*, il s’agit d’ « une approche holistique et intégrée qui applique simultanément des concepts et des principes écologiques et sociaux à la conception et à la gestion de systèmes agricoles et alimentaires durables. Elle cherche à optimiser les interactions entre les plantes, les animaux, les hommes et l’environnement tout en répondant à la nécessité de systèmes alimentaires socialement équitables au sein desquels les gens peuvent choisir ce qu’ils mangent et comment et où il est produit. […] »
Grâce à l’action de l’ancien ministre de l’agriculture, Stéphane Le Foll, l’agroécologie s’est installée progressivement en France notamment grâce à la naissance de l’initiative internationale 4 pour 1000 porté par le ministre lors de la Conférence Paris Climat de 2015. Selon le Ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, « L’agroécologie est une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes. Elle les amplifie tout en visant à diminuer les pressions sur l’environnement […] et à préserver les ressources naturelles. Il s’agit d’utiliser au maximum la nature comme facteur de production en maintenant ses capacités de renouvellement. »
Depuis 2014, cette approche est officiellement reconnue puisqu’elle figure dans l’article 1 du code rural français : « Les politiques publiques visent à promouvoir et à pérenniser les systèmes de production agroécologiques, dont le mode de production biologique, qui combinent performance économique, sociale, notamment à travers un haut niveau de protection sociale, environnementale et sanitaire. »
Les enjeux : produire, protéger, prévenir et amortir
L’agroécologie est donc une approche systémique, qui invite à sortir d’un modèle agricole qui se restreint à « pour chaque problème, une solution » et de s’appuyer sur une vision plus élargie des pratiques, autant à l’échelle d’une exploitation que du territoire. Elle appelle à une transformation des modèles alimentaires pour tous les producteurs et éleveurs.
L’agroécologie répond ainsi à trois enjeux clés :
- produire : du vivant, de la biomasse, des aliments (en quantité et qualité suffisante pour assurer la sécurité alimentaire), de l’énergie, des matériaux ;
- protéger : la santé des sols, des hommes, des animaux, de la planète ;
- prévenir et amortir : les aléas climatiques, les pertes de rendement, les risques sanitaires.
Les ambitions de l’agroécologie sont multiples : régénérer les sols, favoriser la biodiversité, améliorer la qualité de l’eau, lutter contre les dérèglements climatiques, se reconnecter au vivant, revitaliser les territoires et garantir une alimentation saine, de qualité pour tous.
Un sol vivant et fertile, pilier de l’agroécologie
Le sol est un système écologique très complexe et riche. En bonne santé, il contient 25 % d’air, 25 % d’eau, 45 % de matière minérale (argile, limon, sable) et 5 % de matière organique (débris végétaux et animaux, humus…). C’est un mélange entre du vivant (95 %) et de l’inerte (5%), en constante évolution.
Dans le vivant, un grand nombre d’organismes cohabitent : les vers de terre, qui jouent un rôle sur le recyclage et la libération des éléments nutritifs mis à disposition pour les plantes, et participent à la structuration du sol ; les bactéries et les champignons, qui contribuent à la biodégradation de la matière organique ; les champignons mycorhiziens, qui, associés aux racines des plantes, favorisent l’absorption de l’eau et la captation du carbone et protègent des stress physiques, chimiques et biologiques.
Maintenir un sol vivant et fertile est donc un objectif primordial dans le cadre d’une transition agroécologique. Pour lui permettre de produire de la biomasse abondante et diversifiée, il s’agit de le nourrir avec de la matière organique fraîche, c’est-à-dire à lui restituer l’équivalent de ce qu’il a élaboré. Un équilibre essentiel pour une agriculture pérenne.
Source Ver de Terre Production
Concrètement : quelles sont les pratiques agroécologiques ?
La couverture des sols en continu est l’une des pratiques incontournables de l’agroécologie. Elle peut être assurée par des espèces cultivées en tant que cultures principales ou en interculture, mais aussi par des résidus de cultures. Semis d’une seule espèce ou en association, engrais verts, cultures pièges à nitrates…le choix des espèces va dépendre des conditions pédoclimatiques des parcelles et des objectifs du producteur. Dans tous les cas, ce levier contribue au renouvellement de la matière organique du sol.
D’autres pratiques facilitent la restitution de la biomasse produite. Comme l’agroforesterie, qui associe une production agricole avec l’implantation d’arbres dans le champ ou sur les abords. Ou comme la présence d’un troupeau, avec une gestion du pâturage adéquate.
Autre levier agroécologique : la réduction du travail du sol au minimum. En effet, les passages répétés d’outils dans les parcelles peuvent perturber la vie des organismes vivants et détériorer la qualité du sol – structure, texture, appauvrissement en matière organique, formation possible d’une croûte compacte…-. Il s’agit alors de mettre en œuvre des techniques simplifiées, sans labour mais en utilisant des outils à dents ou à griffes moins perturbants, voire de semer directement sans intervention préalable.
Le panel de solutions disponibles est large pour s’engager sur la voie agroécologique. Il s’agit de sélectionner celles qui correspondent le mieux au contexte de l’exploitation, avec une approche intégrée et sur la base d’expérimentations menées in situ.
Pour mesurer les impacts de la mise en place de mesures agroécologiques, l’Indice de Régénération est un outil fiable et gratuit, élaboré par les chercheurs du Conseil Scientifique de Pour une Agriculture Du Vivant, des agriculteurs et des techniciens de terrain. Il se base sur huit axes : la couverture du sol, le travail du sol, le cycle du carbone, la fertilisation azotée, la gestion phytosanitaire, la biodiversité, l’agroforesterie et la formation. Il permet d’obtenir une note sur 100, reflétant le niveau agroécologique d’une ferme, de manière systémique. Un outil à utiliser sans modération pour suivre sa transition vers une voie plus harmonieuse.
*FAO : Food Agricultural Organization